Actualité de l’Observatoire

Le premier Rapport sur les discriminations en France vient de paraitre

Pour la première fois, un ouvrage réunit des données sur l’ensemble des discriminations, que leur motif soit l’origine, le genre, le handicap, l’orientation sexuelle ou l’appartenance syndicale par exemple. Anne Brunner et Louis Maurin vous présentent le « Rapport sur les discriminations en France », qui vient de paraitre.

Publié le 28 novembre 2023

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Qu’il s’agisse de la couleur de peau, du sexe, de l’orientation sexuelle ou du handicap, par exemple, les discriminations minent la vie de celles et ceux qui les subissent. Pour comprendre leur ampleur, le rapport que nous publions aujourd’hui réunit un ensemble complet de données commentées. Il a vocation à devenir une référence pour sensibiliser à ce sujet et en débattre.

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La création du Défenseur des droits en 2008 a permis d’améliorer l’information. La communauté scientifique, elle aussi, se mobilise. Dès 2010, un rapport avait estimé nécessaire la création d’un Observatoire des discriminations au sein du service public [1]. Des données existent. Un nombre de travaux importants ont été par exemple menés au sein de la Fédération de recherche du CNRS « Théorie et évaluation des politiques publiques » ou via les enquêtes « Trajectoires et origines ». Mais aucun organisme, privé ou public, ne réunit les données nécessaires à dresser un inventaire général, qui puisse offrir une vision transversale des discriminations pour un large public (voir encadré ci-dessous). Aucun observatoire n’a été finalement créé [2]. Personne ne prend vraiment en charge le dossier. Aussi étonnant que cela paraisse, c’est la première fois qu’un tel document est publié sur le sujet dans notre pays. Tout citoyen devrait pouvoir accéder à ces informations de base.

Dans ce rapport, nous publions des faits vérifiables, sans prise de position. Notre travail vise à améliorer la connaissance, à dire ce qui va mal, mais aussi ce qui va bien. Comme pour les inégalités, nous refusons toute exagération qui aboutit à décrédibiliser le propos. Ce n’est pas en transformant la réalité que l’on peut convaincre.

S’attaquer aux discriminations, c’est combattre la face la plus violente des inégalités. Des pratiques qui blessent car aucun argument ne peut les justifier et parce qu’elles touchent l’identité même des personnes qui les subissent. Être écarté du fait de votre couleur de peau, votre sexe, votre orientation sexuelle ou votre handicap constitue une violence d’un degré supérieur au fait d’être désavantagé parce qu’on n’a pas réussi à l’école, par exemple.

Afficher les discriminations n’implique en rien d’occulter les inégalités sociales (peut-être moins violentes mais beaucoup plus répandues), au contraire. Ne soyons pas naïfs : une partie des discours sur la nécessaire inclusion des femmes ou des personnes handicapées, par exemple, ont pour fonction de masquer la profonde fracture sociale. De nombreux discours sur la « diversité » sont utilisés pour faire diversion au sujet des inégalités de salaires. La parité entre femmes et hommes mise en avant au sommet des entreprises ou de l’État par certains ne les empêche pas de tolérer la précarité dont sont massivement victimes les femmes de milieux populaires, dont le sort est méprisé.

Pour avancer, il faut juste admettre qu’inégalités et discriminations se conjuguent, parfois pour se compenser, parfois pour s’additionner. Une jeune femme immigrée et ouvrière subit quatre formes de domination imbriquées. Parmi les facteurs qui influencent la vie de cette jeune femme, chacun doit être remis à sa juste place. Nous montrons, par exemple, comment l’origine migratoire en termes de réussite scolaire est davantage un atout qu’un handicap. Inversement, cette origine constitue en soi, pour certaines catégories d’immigrés, en particulier les descendants d’immigrés d’Afrique, un facteur de discrimination très net sur le marché du travail.

Si nous publions ce rapport aujourd’hui, c’est que se réveille un discours que l’on pensait ne jamais réentendre en France. Le peuple grogne contre les élites, elles lui livrent des boucs émissaires choisis parmi ceux qui ont le moins de moyens de se défendre. La xénophobie a pignon sur rue. Elle est présente sur les plateaux d’une chaine de télévision nationale d’extrême droite, sans que l’autorité de régulation – l’Arcom, la même qui mesure la visibilité des minorités sur les plateaux – ne remette en cause son autorisation d’émettre. Certains élus, la presse et des réseaux sociaux relaient sans honte des propos indignes, cherchent à discréditer les défenseurs de l’égalité, jusqu’à s’en prendre au Défenseur des droits. La marche vers l’égalité entre les femmes et les hommes est remise en cause, les droits des personnes LGBT contestés, les étrangers rendus responsables de nos difficultés. Ce mouvement réactionnaire dispose de moyens financiers importants : une bataille est en cours.

Les militantes et militants anti-discriminations constituent une force bien plus nombreuse qu’ils ne le pensent

Elle est loin d’être perdue. Contre les discriminations et contre les inégalités, l’information est une arme. Nous allons donc prendre part, nous aussi, à ce combat avec nos moyens, aux côtés de forces bien plus nombreuses qu’elles ne le pensent : les militantes et militants anti-discriminations constituent une force colossale. Lutte contre le sexisme et le racisme, combat pour les droits des personnes LGBT et handicapées, défense du syndicalisme, etc., des centaines de milliers de personnes sont à l’œuvre tous les jours dans de très nombreuses associations pour défendre l’égalité dans tous les domaines. Leurs forces dépassent de loin celles de leurs opposants. Ces défenseurs de l’égalité ne contrôlent aucune chaine de télévision, mais ils pèsent sur le terrain de manière beaucoup plus puissante que le camp opposé. Notre objectif est de soutenir leur lutte en leur apportant de quoi nourrir leurs discours, comme leurs débats.

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Rapport sur les discriminations en France, édition 2023, sous la direction d’Anne Brunner et Louis Maurin, Observatoire des inégalités, novembre 2023.
96 pages.
ISBN 978-2-9579986-7-8
12 € hors frais d’envoi.
Également disponible en version numérique à télécharger.
En cas de difficultés financières, vous pouvez demander l’envoi gratuit de l’ouvrage.

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Remerciements
Ce rapport a été réalisé et publié grâce au soutien de 700 personnes qui ont contribué à notre campagne de financement participatif. Nous les remercions chaleureusement. Le travail de l’Observatoire des inégalités n’est possible que parce que vous nous y aidez.

Ce rapport bénéficie aussi du soutien de l’association d’éducation populaire nantaise l’Accoord, d’Apivia Macif Mutuelle, du bureau d’études Compas et du cabinet de conseil Tenzing.

Nous remercions également le réseau de bénévoles de l’Observatoire des inégalités qui assure en particulier la relecture et la diffusion de l’ouvrage.

[1Voir « Inégalités et discriminations. Pour un usage critique et responsable de l’outil statistique », Rapport du comité pour la mesure de la diversité et l’évaluation des discriminations présidé par François Héran, présenté à Yazid Sabeg, commissaire à la diversité et à l’égalité des chances, février 2010.

[2Il existe un Observatoire des discriminations, au sein de l’université Paris 1, mais il ne semble plus en activité.

Date de première rédaction le 28 novembre 2023.
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